Après avoir été le candidat de la "rupture", puis celui de la "rupture tranquille", Nicolas Sarkozy se présente désormais en candidat "hors système" et centre sa campagne sur le travail et le pouvoir d'achat, à 80 jours du premier tour de l'élection présidentielle.
"Je ne suis pas le candidat du système", a déclaré jeudi le ministre de l'Intérieur à des journalistes, à l'issue d'une visite matinale au marché de gros de Rungis, près de Paris.
"J'ai installé le thème du travail et du pouvoir d'achat dans la campagne. Je suis le candidat du travail", a ajouté le candidat de l'UMP à l'élection présidentielle, qui multiplie les interventions sur ce thème lors de ses déplacements.
Il en fait remonter la genèse aux discours sur "une France plus juste" et sur "la France du travail", qu'il a prononcés au printemps 2006 à Douai et Agen : "Imposer le thème du pouvoir d'achat et du salaire comme thème du candidat de la droite, ça ne se fait pas tout seul, c'est un métier", fait-il valoir.
Il prend cependant soin de préciser que "ça n'a rien à voir avec la fracture sociale" que promettait de réduire le président Jacques Chirac, lors de sa campagne de 1995 : "Je ne plaide pas pour plus d'assistanat mais pour plus de travail."
"Nicolas Sarkozy est un candidat hors-système", a réaffirmé en écho son porte-parole de campagne, le ministre de la Santé Xavier Bertrand, lors d'un point presse, signe que ce nouveau label est le fruit d'une stratégie réfléchie.
Depuis son investiture par l'UMP, le 14 janvier, Nicolas Sarkozy s'efforce de gommer son image de libéral, de chef de parti et de membre d'un gouvernement dont le bilan ne manquera pas d'être associé à sa personne par ses adversaires.
Soucieux de "décomplexer la droite", il n'en cherche pas moins à balayer large, des cadres supérieurs aux ouvriers et employés, pour tenter de rallier des voix au-delà de sa famille politique, de l'extrême-droite aux déçus de la gauche.
"Je tiens le même langage partout. Parler aux salariés maghrébins du pavillon des fruits et légumes de Rungis et aux gens de Morgan-Stanley, c'est la même chose. Ils veulent tous être respectés", affirme-t-il.
Cette volonté d'ouverture, il dit avoir également voulu l'appliquer dans la constitution de son équipe de campagne en faisant appel à d'autres personnalités que celles qui ont accompagné son ascension ces dernières années.
Quant à la "rupture", qui était son leitmotiv jusqu'à son discours d'investiture, le 14 janvier Porte de Versailles, il dit l'incarner aujourd'hui dans sa "manière de faire de la politique" et ne plus avoir "besoin d'insister".
Il fallait, explique-t-il de façon imagée, "aller un peu trop loin", comme on "étire un muscle pour l'assouplir" - "Ça fait mal mais après ça revient en place" - pour aboutir à un discours "de synthèse et d'équilibre" le 14 janvier.
Quant au thème du travail, il est plus transversal et moins marqué idéologiquement que ceux de la sécurité et l'immigration, sur lesquels il a bâti sa popularité ces dernières années.
Nicolas Sarkozy se montre confiant dans sa stratégie, qui lui permet, selon lui, de faire "la course en tête".
"Toute la campagne se focalise sur moi (...) Cette stratégie, jusqu'à présent, a été gagnante", affirme-t-il. "Je suis, ce 1er février, exactement là où je voulais être."
En revanche, la candidate socialiste Ségolène Royal, "à la mode pendant des mois", a fait l'erreur de ne conduire jusqu'ici qu'une "campagne d'image", dit-il : "Il faut tellement de temps pour installer ses idées que c'est une erreur de penser qu'on peut les garder pour la fin (...) Moi je fais une campagne de fond ; on ne fait pas le même métier."
"La différence entre le trou d'air que Ségolène Royal connaît et les problèmes que j'ai pu avoir", ajoute-t-il, "c'est qu'elle n'a pas fait de choix. Elle ne sait pas si elle fait une campagne de droite, du centre ou de gauche, avec ou sans le PS."
Prudent, il affirme cependant que la campagne de la candidate socialiste "ne va pas si mal que ça", de même que "ça n'allait pas si bien qu'on l'a dit lors de son investiture".
Il dit quant à lui s'être préparé "psychologiquement à ne pas être désespéré quand ça ne va pas bien et à ne pas être exalté quand ça va bien" et jalonnera les prochaines semaines de coups médiatiques, comme la réunion de ses comités de soutien à Paris le 11 février, jour où Ségolène Royal présentera son programme, ou une grande conférence de presse début mars.
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